Soutenance de thèse :
Diversité mécanistique et innovations catalytiques chez les enzymes à radical SAM : Découverte et caractérisation de deux réactions inédites
Depuis plus de vingt ans, la superfamille des enzymes à radical S-adénosyl-L-méthionine (radical SAM) ne cesse de surprendre par l’ampleur et la sophistication des transformations qu’elle catalyse. Ubiquitaires dans le vivant, ces enzymes exploitent la chimie radicalaire pour remodeler, fonctionnaliser ou assembler une grande variété de biomolécules, qu’il s’agisse de métabolites secondaires, d’acides nucléiques, de protéines ou de peptides d’origine ribosomique. Après deux décennies de recherches, leur diversité architecturale et leur versatilité mécanistique demeurent encore largement inexplorées.
Dans ce contexte, j’ai étudié deux représentants singuliers, incarnant deux visages complémentaires de la biochimie radicalaire. La première enzyme se distingue par une organisation bi-modulaire, associant deux domaines de fonctions distinctes. Cette architecture inédite lui confère la capacité de combiner deux réactions radicalaires paradoxales et successives, conduisant à l’installation de modifications post-traductionnelles originales sur un peptide de type RiPP. En combinant spectroscopie, biologie structurale et approches biochimiques, nous avons cherché à capturer et caractériser des intermédiaires réactionnels, afin d’obtenir une vision intégrée du mécanisme de cette nouvelle enzyme. Ces travaux qui apportent un éclairage nouveau sur le rôle de l’oxygène dans la catalyse des enzymes à radical SAM, mettent en évidence une réactivité insoupçonnée.
La seconde enzyme étudiée au cours de cette thèse, PylB, intervient dans la biosynthèse du vingt-deuxième acide aminé protéogénique, la pyrrolysine. Nous avons montré que cette enzyme, bien qu’elle possède une architecture minimaliste, catalyse une réorganisation intramoléculaire inédite de la lysine, reposant sur un mécanisme original d’économie radicalaire : le radical 5’-désoxyadénosyle généré lors de l’initiation de la réaction est recyclé au cours de la catalyse. De façon inattendue, nous avons également mis en évidence que cette enzyme peut utiliser son produit comme substrat, conférant à la réaction une réversibilité totale, comme nous l’avons démontré par des expériences de marquage et des analyses spectroscopiques.
Au-delà de leur caractérisation biochimique, structurale et spectroscopique, l’étude de ces deux systèmes enzymatiques offre un éclairage nouveau sur l’évolution fonctionnelle et catalytique des enzymes à radical SAM. Elle souligne la richesse de cette superfamille émergente de biocatalyseurs et ouvre des perspectives inédites pour l’exploration de leur formidable diversité.
Membres du jury:
- Nicolas ROUHIER, Professeur, Université de Lorraine – Rapporteur & Examinateur
- Pierre CROZET, Maître de conférence (HDR), Sorbonne Université – Rapporteur & Examinateur
- Alessandra CARBONE, Professeure, Sorbonne Université – Examinatrice
- Benoît D’AUTRÉAUX, Directeur de recherche, INSERM (Université Paris-Saclay) – Examinateur
- Frédéric AVENIER, Professeur, Université Paris-Saclay – Examinateur
- Sylvie LAUTRU, Directrice de recherche, CNRS (Université Paris-Saclay) – Examinatrice
Thèse dirigée par: